Tokyo : mon 6ème major marathon
[Partie 2]

km26 : J’ai chaaaauuuud… Je me sens mal mal mal, j’ai des fourmis dans les doigts, le bide qui se demande ce qu’il fou là… Et je crois que j’ai envie de vomir. Il faut savoir que j’ai la phobie de vomir. Je ne vomis JAMAIS (j’ai vomi 4 fois uniquement dans ma life), j’ai peur, j’ai l’impression que je vais crever et pour couronner le tout, on dirait un cochon qu’on égorge tellement je fais du bruit. J’admire les gens en soirée qui, comme ma meilleure amie, arrivent à appliquer l’adage « vomir c’est repartir »… Pour moi vomir rime avec MOURIR !
Il me faut un effort de concentration immense pour résister jusqu’au km30 où je finis par dégueuler à côté de la table (pas numéro 4)… Tout se bouscule dans ma tête « oh mon dieu tu vomis » « oh mon dieu tu vomis devant des gens » « oh mon dieu tu es en train de niquer ton marathon »… mais par « chance » je ne vomis QUE mon gel du km 21… L’adrénaline me fait agir automatiquement : vomir, verre d’eau, rinçage de bouche, repartir en seulement quelques secondes.
Si j’avais chaud…C’était sans compter cet épisode… Je suis trempée. C’est le bordel complet dans ma tête, je me sens faible, j’ai soif, j’ai chaud, le cœur qui bat à 100000… Je ne sais pas si je dois prendre mon gel restant immédiatement pour me redonner un coup de boost ou si je dois attendre le km34 comme dans le plan initial.
km34 : Je prends mon gel… que je vomis 500m plus loin. S’il me restait 2% de force, je suis à présent à -12000, dans une dimension parallèle. Sur le chemin, je constate que c’est l’hécatombe, tellement de personnes marchent, et notamment des coureurs des sas bien plus rapides que le mien. Le manque d’ambiance me pèse, les passages au soleil me fusillent et les longs allers-retours détruisent mon moral. Ma gourde est vide depuis bien longtemps et dans un geste d’énervement, je la balance un peu plus loin.
Les derniers km sont atroces, le chrono ? Le cadet de mes soucis, je veux juste que ça s’arrête.
Au km40, je me souviens avoir pensé « allez plus que 12 minutes environ » (Mes stats montreront qu’en fait, j’ai « couru » les 2 derniers km en 7’20/km)
Je franchis la ligne d’arrivée en zombie au bout de 3h43 d’efforts qui m’auront facilement paru le double ! Je remarque devant moi, l’instagrameur hyper connu qui passe les lignes d’arrivées comme s’il défilait. Alors que je m’approche pour lui demander un selfie, je dois rapidement faire demi tour pour, encore une fois aller vomir.
Je fais la queue pour récupérer la médaille du marathon, puis cherche le spot pour la 6 stars. Sur le trajet, on me tend du fromage, du shampooing ou autre goodies que je ne prends pas, je suis ailleurs. Je récupère ma médaille, un mec me filme, je souris, mais dans le fond, je suis triste et dégoutée. Je me pose dans un coin et décide d’enregistrer une vidéo pour Suzzy. Au moment où j’ouvre la bouche, je fonds en larmes. J’étais si sûre de réussir, ma prépa avait été si belle… finir comme ça, c’est tellement loin de ce que je m’étais imaginée.
Santhosh m’écrit, lui aussi n’a pas fait le chrono espéré car lui aussi a beaucoup souffert de la chaleur. Nous essayons de nous retrouver, mais une fois de plus la rigueur Japonaise nous a contraint d’emprunter des chemins différents. Alors que je me dirige vers le métro, a nouveau je ne me sens pas bien… Je m’assois (m’affale) au coin d’une rue et patiente le temps que cela passe. 45min de sms plus tard avec ma soeur, et même si ça ne va pas mieux, je décide de repartir car, malgré la chaleur et le soleil qui tape, je suis morte de froid.
Dans le métro, BONHEUR, il fait chaud ! En plus, je trouve un français et un belge (pas ravis des performances du jour) avec qui je peux papoter pendant les 45min de trajet. Alors qu’il ne reste que 3 arrêts… D’un seul coup, je sens une grosse bouffée de chaleur m’envahir, les fourmis dans doigts sont de retour, ma vision se brouille, j’entends tout très très lointainement et mon ventre se met a gargouiller terrible… « mon dieu je vais vomir ou c**** dans le métro », « Non Charlotte, concentre toi… Tout est si propre ici, tu ne peux pas ! » J’envisage toutes les options, notamment celle d’utiliser le sachet en plastique contenant les seuls goodies que j’ai attrapé. J’ai juste le temps de dire à mes 2 collègues « je crois que je ne me sens pas très bien » que je me retrouve par terre.
Souffler -respirer- se concentrer…3 arrêts Charlotte, TROIS ARRÊTS ! « Mesdames messieurs, nous sommes actuellement à l’arrêt, nous procédons à des procédures de sécurité » … KILL ME !
Enfin arrivée à Shinjuku, je rentre en moonwalk jusqu’à mon hôtel. Arrivée sur place, je reste affalée 1h00 sur la moquette de ma chambre, incapable de bouger. Je suis dead. Je décide de prendre un bain puis de me blottir sous la couette pour me réchauffer.
Vers 19h00 je reprends un peu mes esprits et retrouve mon ami pour aller diner. J’ai repéré un petit resto 100% sans gluten ! Il est à l’autre bout du monde, mais je mérite ! Dehors nous sommes en t-shirt, le temps est super doux. Nous passons une chouette soirée à parler de tout et de rien et refaire le monde. En mangeant, je me rends compte que c’est mon premier vrai repas depuis 4 jours.
La nuit est à nouveau blanche et je me refais le film de ce qu’il s’est passé aujourd’hui. La tristesse a laissé place à la colère : TOUT CA POUR CA !! 3 mois de prépa, un voyage à l’autre bout du monde, autant de temps, d’argent, d’investissement pour ce résultat ?! Pffff… Je ne décolère pas !
Le lendemain, c’est sous des bidons d’eau que je traverse Tokyo pour aller à la « Medal Monday Breakfast », cérémonie sous forme de brunch organisée pour tous les 6 star finisher dont je fais désormais partie. Sur place, je discute avec un Suisse, un Allemand et même une Brésilienne, tous ont été très surpris des conditions météo de la veille…
Sur le chemin du retour, la pluie à laissé place à la neige et j’ai l’impression que quelqu’un s’amuse à me faire une mauvaise blague. Les 3 jours suivants, j’essaye de visiter, profiter sur place, mais le coeur n’y est pas. Je suis toujours fatiguée-énervée-dépitée… La galère des repas continue, j’ai clairement envie de rentrer !
Le jeudi matin c’est ENFIN l’heure pour moi de quitter Tokyo. 1h de bus + 14h20 d’avion + 3h30 d’attente à Munich + 1h45 d’avion + 2h de voiture.. 23 heures de trajet et je serai à la maison. A Munich, mes nerfs lâchent… Mais je me retiens de pleurer pour ne pas EN PLUS avoir le nez bouché.
2h00 du mat’ : Je me couche épuisée, mais DANS MON LIT entourée de mes cats et mon chéri !


Petit souvenir de Tokyo...
Le lendemain, l’heure est au bilan… Prendre du recul et comprendre là où j’ai m***dé.
- L’alimentation : J’accuse un -2kg sur la balance, en 5 jours sur place à Tokyo. Sur ce côté, je n’ai pas été assez vigilante. J’étais loin de me douter « qu’au pays du riz » j’aurai tant de difficultés à manger sans gluten. Pour mes prochains voyages, ce point sera a anticiper.
- La météo : pour le coup, c’est un paramètre que je ne peux pas maitriser. Une prépa en hiver, un 20 degrés à 9h le jour de la course, de la neige de lendemain… C’est la loterie, et je ne peux rien faire contre ça. Tout comme le fait de ne pas supporter la chaleur. It is what it is comme ils disent…
- La fatigue / le décalage horaire : J’ai clairement minimisé l’impact du décalage horaire sur mon corps. Le Japon, ce n’est pas comme aller courir dans le bled du coin. Une prépa marathon dans les jambes + 20h de trajet à l’autre bout du monde + des nuits blanches à répétition + une arrivée tardive sur place… MAIS, il y a tout l’aspect financier qui rentre en compte. Arriver plus tôt = plus de frais sur place = encore plus de jours sans pouvoir m’alimenter correctement = encore plus de fatigue, finalement c’est un peu le serpent qui se mort le bout de la queue. Je ne suis pas sponso, et je ne chie (pas encore) des billets, donc compliqué.
Le vendredi pour recharger les batteries avec tout ma family nous sommes allés nous exploser le bide au resto : BURGER (sans gluten) et mousse au chocolat beurre de cacahuètes au dessert.
Le lendemain, au réveil je suis comme dans un état second. J’ai l’estomac en vrille complet et je me sens dans un état de fatigue encore plus avancé… Le contre coup ? Le soir, voyant mon état se dégrader, ma mère appelle SOS Médecins. C’est vers 23h30 que je suis prise en charge. Pas de covid (c’est déjà ça), mais de la fièvre et un ventre qui fait des bruits très étranges… La médecin me donne des analyses à faire pour le lundi matin à la première heure.
Son départ sonne pour moi le début de la fin… Toute la nuit et tout le dimanche, je me vide toutes les 30 secondes. Impossible de manger ni de boire. Le lundi ENFIN c’est l’heure d’aller faire mes analyses. Comme les vieux je suis au labo à 7h00 pétante. 7h06 je suis chez moi, je n’ai plus qu’a prendre mon mal en patience jusqu’aux résultats.
17h50 toujours pas de nouvelles du labo… Je décide d’y retourner… Évidement il y avait un problème avec mon dossier. 18h30 j’ai mes résultats… Trop tard pour aller chez le médecin, je retourne chez SOS Médecins.
21h30 : je suis prise en charge par une nouvelle doc, à qui A NOUVEAU je dois ré expliquer mon histoire… Elle me dit : « par contre là, c’est pas ça qu’on aurait dû vous donner comme analyses à faire… ça sert à rien ça … » STEU BLAGUE !! Si dans la vie je ne suis pas du genre à me faire du souci, depuis ce lundi, je lui raconte qu’un détail m’inquiète : « je chie blanc » (désolé pour les détails mais au moins vous saurez que si ça vous arrive c’est le signe d’une infection. C’est le foie qui n’arrive plus à suivre).
Elle ajoute à son ordo de prise de sang, une analyse de selles. Je repars à la maison avec du spasfon. Je suis crevée et à bout. Je n’ai rien mangé depuis 4 jours et le peu que j’ingurgite ressors quasi immédiatement.
Mardi matin, rebelote, 7h00 -labo – prise de sang. 11H30 : les HALLELUJAH résultats sont là ! Go chez le doc ! Par chance, je connais suffisamment mon médecin pour avoir son 06. Il me fait passer entre 2 rendez-vous et confirme mon infection. Oui mais à quoi ?! Seules les analyses de selles pourront nous révéler cela. Cette fois je repars avec des antibio.
Je vous épargne les autres détails sordides suite à cette prise d’antibio aka DESTOP mais vous avez l’image. Deux jours plus tard, un léger mieux se fait ressentir malgré une fatigue sévère. Les spasmes de l’enfer s’espacent et ENFIN j’arrive (un peu) à m’alimenter ! Il va falloir car sur la balance j’en suis désormais à -6 kilos.
Quand les fameuses analyses arrivent, elles révèlent que la bactérie responsable de tout se retrouve dans l’eau souillée. L’eau des glaçons, des fruits ou légumes rincés… MAIS QUOI ?! Oui j’ai bu l’eau des carafes avec glaçons dans les petits boui-boui car les currys étaient hyper épicés, oui j’ai rempli ma gourde à droite et à gauche, mais je ne me suis pas méfiée ! MAIS JUSKOBOUT CE JAPON QUOI !
Bref, avec un 2eme round d’antibio, les choses ce sont rapidement améliorée au niveau du ventre. En revanche, mon corps a pris hyper cher ! Aussi quand on me demande si j’ai couru le marathon de Paris ou si j’ai repris les entrainements intensifs, je ris. D’une part en temps normal courir un marathon est une épreuve pour le corps mais alors après cette mésaventure, je ne vous raconte pas. Attention les gars, à la perception biaisée de la facilité de courir un marathon à cause des réseaux.
Ainsi s’achèvent les aventures de Martine Charlotte au Japon. J’avoue que je suis encore un peu dans la rancœur de cet enchainement de péripéties, mais il y a plus grave dans la vie, la 6 star est là, des marathons, il y en aura d’autres, des RP aussi je l’espère…
Merci à VOUS pour cette vague d’amour reçue par sms, whatsapp, insta… Vraiment ça m’a beaucoup touché ! Merci aussi Santhosh d’avoir partagé cette aventure avec moi… Rdv à L.A 🙂
Si vous avez manqué le début de mes aventures à Tokyo… Elles sont à découvrir par ici…